26 février 2011

Préliminaires: planches d'avant !

Le Nuage

C'est une histoire - certes un peu naïve de nos jours - qui n'a JAMAIS été publiée nulle part, même dans un fanzine, mais qu'un magazine hollandais qui me réclame de l'inédit depuis un moment souhaitait proposer. Prémices d'une carrière, avant les albums.

En 81, il y a trente ans, mon ami Claude Gemignani qui bosse au Studio Dargaud me propose une courte histoire en 5 planches pour que je fasse mon entrée dans Charlie, une sorte d'intronisation, il connait bien Mandryka et lui a parlé de moi pour un projet d'album qui traîne - et d'ailleurs n'aboutira pas - sur lequel on a bossé tous les deux...

Cette fois il me sort de ses cartons quelques feuillets dactylographiés, rédigés pour ses potes Formosa et Blanc-Dumont, qui ont déjà dessiné des nouvelles courtes sur ses textes, parues dans Pilote.

Mais ce "nuage" qui tombe avant Tchernobyl est une petite histoire vaguement écolo anti-Denain (Nedin...) qu'il a envie de voir publiée aussi. Il me la confie et je dessine les planches assez vite en 82, je crois, entre trois pages de SAS (autre projet) et l'album Waterloo, paru chez Larousse. Pas très bon pour les voitures, je demande à l'ami Brice de me crayonner les pages 3 et 4, histoire d'avoir un truc montrable. J'ai l'habitude de bosser avec lui, depuis Plein Pot, et d'ailleurs il crayonnera aussi pour me mettre en selle les 4 premières pages de Timon des Blés, quand tétanisé d'avoir signé, je bloque un peu au moment de commencer...

Bref, les planches sont prêtes, Martine, sa femme d'alors nous réalise les couleurs sur bleus et films noirs (aux frais du studio) et on présente. Las, ça ne plaît pas plus que ça à Nikita, et l'histoire ne paraît jamais. J'ai les pages à la maison, enfin, des reproductions, et quand je passe chez Glénat trois ans plus tard, j'oublie ce truc...

L'an passé, Nickey Hakkens, un internaute hollandais me demande par mail si j'ai des choses à lui proposer d'inédit pour p@per, un magazine qu'il publie tous les trois mois là-bas, alors je repense à ça.

Mais il m'a fallu retrouver les pages dans mes cartons, en scanner une qui me reste (j'ai perdu les couleurs des trois premières, faites pourtant, mais qui doivent traîner quelques part dans une chemise qui contient mes vieux dessins...) trois en noir et blanc et les deux dernières en couleur, mais surtout les lettrer à nouveau.

Car j'avais bien sûr fait des calques pour le texte original écrit par Claude, textes à replacer dans les bulles prévues pour, mais ces feuilles ont disparu depuis des années. C'était manuel, au Rotring sur des calques Canson, le lettrage "Jacques Martin" d'alors, en capitales et bas de casse.

Du coup, hier soir comme il me demandais les pages, je me suis enfin décidé à les terminer pour lui et j'ai lettré en tentant de me souvenir des mots, mais c'est plus l'esprit du truc que du mot-à-mot. Une adaptation des dialogues de Claude, que je n'ai pas trahi...

Soyons clair, c'est une archive qui vaut ce qu'elle vaut. Mais à bien regarder, le nuage préfigure mon travail d'ensuite, à venir, j'étais très imprégné par Alix et Jacques Martin dont je reprenais pas mal les codes graphiques comme vous allez voir.


Trois ans plus tard, subjugué par Juillard et Bourgeon, je laisse un peu le style raide martinien quand je commence à bosser pour Vécu, mais la ligne claire reste mon fond de commerce et ce qui fait ma spécificité, un truc qui me permettrait de reprendre une série comme Blake et Mortimer ou Lefranc sans trop de difficulté...

Jugez plutôt en vous souvenant que ces dessins ont été faits il y a trente ans !

3 commentaires:

  1. Et vous avez le droit de ressortir du font des tiroirs des travaux qui vous avaient été commandés par d'autres ? Pour les journalistes, j'avais la notion que tout travail mérite salaire, et donc les articles non publiés sont payés au pire, moitié prix. ça ne fonctionne pas ainsi dans la BD ?
    Et puis, ne dites-vous pas que le texte était d'un autre? Vous pouvez l'utiliser malgré tout?
    Par ailleurs, c'est intéressant de voir l'entraide et le travail d'équipe, l'un qui crayonne des voitures pour son ami, la femme qui se charge des couleurs.
    Et puis, le trac des débuts... Avec les années, ressent-on encore parfois ce trac à la signature d'un contrat qui tient à coeur ?

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  2. Justement, ca n'a été commandé par personne et encore moins payé... Le texte est d'un autre, mais sur un truc en commun que j'assimile. Après, le but c'est qu'on le voie, même longtemps après.

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  3. Tout à fait d'accord. Tout ce travail pour finir au fond d'un placard, quel gâchis de temps et de talents ! Alors, s'il y a moyen de faire voir le jour à tout ça...
    Avec l'article suivant, ça fait plaisir de constater que vous débordez d'énergie et de projets ! ça sent le printemps!

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