19 janvier 2014

Angoulême ? euh, non...

L'ordre règne au pays des petits Miquets ? Voire...

Fin janvier et à nouveau Angoulême. Comme chaque année depuis que je fais de la BD, (j'ai publié mes premières pages en 77, je suis allé pour la première fois à Angoulême en 1982, avec l'ami Brice, pour voir...) l'inévitable cortège de questions des copains et des proches.

"T'y vas ou t'y vas pas ?" 

J'y vais pas.

"Ah bon ?"

Regards navrés remplis de commisération quand je réponds par la négative, d'amis et de membres de la famille qui grimacent, me pensant tricard à vie ou carrément en dehors du métier pour ne pas être invité à ce qu'ils considèrent tous comme LE "festival de Cannes de la Bande dessinée".

Ils n'ont pas tort. C'est vrai qu'il faudrait y être. À condition d'avoir quelque chose à y défendre et de savoir pourquoi on y va. Et de s'asseoir sur quelques principes. J'étais invité par Jungle en 2012 et j'avais décliné. Faut dire qu'ils venaient de me dire que la série entamée stoppait, mais sans vergogne, trouvaient normal que j'accepte d'aller signer un titre mort-né durant quatre jours, pour eux...

Il y a certes d'autres formidables festivals dans ce pays, mais aucun avec cette renommée et le battage médiatique qui en fait partie, une fois dans l'année. Ne pas y être est dommageable quand on a un bouquin qui vient de sortir parce que la presse y est en nombre et que ça peut être l'occasion de se montrer, d'avoir quelques articles, pour peu qu'on soit assez introduit "au bon moment au bon endroit", si je puis dire. Avec des attachées de presse qui font le job, ça peut être une occasion de pousser le titre le plus récent, qui en a bien besoin...

Bon, l'an passé en janvier 2013, on me réinvite. On me propose d'y aller en coup de vent le samedi pour parler de crowdfunding. Payé, correctement. J'ai décliné la généreuse proposition, c'était un peu compliqué de descendre comme ça et le voyage bien long pour une seule heure d'intervention le samedi midi, avant de rentrer at home sans aller faire coucou à quelques copains.

Et puis je ne peux pas me répandre sur un festival sclérosé comme celui-là ici sur mon blog et y aller ensuite la fleur au fusil comme si de rien n'était.

Oui, je suis toujours aussi ulcéré de voir les tarifs prohibitifs que doivent payer les visiteurs pour avoir le droit d'entrer dans les bulles acheter des livres... Les subventions et cette manne financière qui file dans la poche de gens vivants sur le dos de la BD sans que les auteurs qui sont la source même de ces revenus et la raison d'être du festival ne soient eux aussi rétribués d'une façon ou d'une autre. Pour qui viennent les visiteurs ?

Sans eux, le spectacle n’existerait pas...

Mais personne ne le dit jamais vraiment, on est des gens indépendants, chacun dans son coin défend son pré carré et l'union ne fait pas la force dans ce métier en l'occurrence... Le système est bien rôdé, tout le monde y va à reculons en râlant et en récriminant. Mais ils y vont.

Je sais. On m'objectera que les auteurs ont les retombées des ventes, de la publicité que leur fait le Festival, qu'ils sont de toute façon bénéficiaires. C'est une vraie rigolade. Outre les rumeurs persistantes sur le fait que les albums vendus sur place par les éditeurs ne seraient pas comptabilisés en droits d'auteurs (vrai ou faux, la rumeur a bon dos), il faut avoir conscience que l'ensemble des auteurs - à part quelques Grands - sont désormais tous payés en avance sur droits sur leurs albums et qu'au vu de la chute des ventes, très peu peuvent "rembourser " cette avance pour se remettre à niveau.

Et toucher des droits, donc.

Ce qui revient à dédicacer gracieusement durant trois jours sans toucher un centime.

Oh, on fait des ventes, les albums partent. Une année quand Glénat faisait le relevé des albums partis sur la durée du festival, j'en avais signé 340 ! Mais faudrait en faire des milliers pour que ce soit à terme rentable... Invités, certes, mais du coup sans pouvoir travailler sur l'en-cours, la fatigue, sans défraiement, d'ailleurs la plupart des éditeurs présentent la venue sur le Salon comme un privilège fait à leurs auteurs... Tu penses...

Cette année j'aurais évidemment eu à cœur de mettre en avant Sara Lone et de cultiver les excellentes critiques parues depuis deux mois et demi sur ce titre, issu de Sandawe grâce aux "édinautes", petite maison d'édition belge qui n'aura même pas de stand et sera contrainte de partager une demi-table dans un coin reculé des bulles angoumoisines... Pas envie de camper, j'ai passé l'âge.

Et puis, ça n'empêchera pas les lecteurs de me retrouver ailleurs dans plein d'autres endroits où on aura le temps de se causer, sans cette cohue commerciale qui de toute façon, vu le battage, fera le plein...

1 commentaire:

  1. Ben oui , le travail gratuit , c'est à la mode: des centaines de graphistes qui planchent des jours et des jours sur un projet pour un" concours" dont seuls les 3 premiers gagnants seront rétribués . Des artistes qui payent pour exposer ... et dont on garde l'adhésion à l'assoc. même s'ils ne sont pas retenus . Tant d'abus et personne ne proteste.:(

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